Des Stan Smith fleuries, des Gazelle qui sentent le thé à 17h, et des adidas Samba prêtes à défiler à Chelsea : la collab adidas x Liberty London, c’est un peu la rencontre improbable entre une icône de l’aristocratie textile britannique et un géant du sportswear urbain. Et pourtant… cette fusion florale reste largement snobée. Pourquoi ? Ce n’est sûrement pas à cause du style.
adidas Campus 00s Liberty London @nicbunny
Quand l’Angleterre rencontre Herzogenaurach
Début 2025. Tandis que les timelines TikTok croulent sous les Salomon ACS et les Stan Smith 2.0 repeintes à la va-vite, adidas Originals balance une collab inattendue ou plutôt trop attendue par trop peu de gens. Liberty London, le temple du motif floral chic (et pas que pour mamie), s’invite sur les paires cultes du catalogue Originals : adidas Samba, Gazelle Bold, Campus 00s, Stan Smith, Sambae… Toutes y passent, repeintes façon jardin botanique sous MDMA.
Et pourtant, personne n’a crié au génie. Pas de ruée. Pas de bots. Pas de files d’attente. Une ambiance presque zen autour d’une collection qui, honnêtement, aurait mérité une hype à la hauteur de son héritage.
Parce qu’on ne parle pas d’un simple habillage graphique. Cette collaboration, c’est 225 ans de savoir-faire textile qui flirte avec 75 ans d’histoire sneaker. C’est la fusion improbable entre les archives les plus précieuses de Liberty et les silhouettes les plus iconiques de la marque aux 3 bandes. Mais ça, encore faut-il savoir lire entre les fleurs.
adidas Gazelle Liberty London Floral @lacesyndicate.de
@lilac_blonde
adidas x Liberty : une affaire d’archives (et de flair)
Contrairement à ce que pourrait penser un amateur pressé, Liberty n’est pas qu’une marque de tissus un peu précieuse vendue au mètre dans des boutiques à triple vitrage. C’est un monument du design britannique, un empire fondé en 1875, dont les motifs floraux “Margaret Day”, “Manuela Meadow” ou “Garden Jazz”, ont marqué l’histoire du textile comme les 3 bandes ont marqué celle du sport.
Côté adidas, pas besoin de refaire la légende : Campus, Gazelle, Samba et Stan Smith sont au streetwear ce que les Beatles sont à Liverpool. Et quand les équipes de design de Liberty traversent la Manche pour plonger dans les archives de la marque aux trois bandes, c’est pas juste pour faire du shopping muséal. C’est pour créer une capsule qui réconcilie modernité, tradition et storytelling textile, avec le soin du détail d’un orfèvre ou d’un bootlegger de luxe.
Et là où certains voyaient une tension entre sportswear et élégance anglaise, la collab prouve exactement l’inverse : ces deux mondes ne sont pas opposés, ils sont complémentaires. On peut très bien porter une Gazelle en “Manuela Meadow” et garder sa street cred intacte. Surtout si c’est bien stylé.
adidas Gazelle Liberty London Floral @318matea
Samba, Gazelle, Campus : le floral urbain en version premium
Si vous êtes du genre à porter vos sneakers comme on choisit ses vinyles (avec goût et un brin de nostalgie), cette collab est un rêve éveillé. Les paires cultes de la street culture s’habillent de fleurs façon Chelsea Flower Show sous stéroïdes. Mais attention, on est loin de l’imprimé Barbie ou du look petite maison dans la prairie.
- La adidas Samba, déjà revenue au sommet grâce à la vague « terracecore », devient ici une pièce hybride : toujours urbaine, mais avec un twist poétique.
- La adidas Gazelle Bold, avec sa semelle plateforme et son imprimé “Manuela Meadow”, réussit un tour de force : donner du volume au floral sans tomber dans la caricature.
- La adidas Campus 00s, plus massive, flirte avec le look Y2K sans perdre de son raffinement. C’est un peu comme si Miss Marple avait été styliste pour TLC.
- La adidas Stan Smith, fidèle à elle-même, s’offre une robe “Margaret Day” qui la rend aussi cool pour un date à Shoreditch que pour un pique-nique à Hyde Park.
Bref, cette collection fait ce que très peu de collaborations arrivent à faire : proposer des paires vraiment différentes, mais jamais déguisées. L’imprimé à fleurs n’est pas là pour faire joli. Il raconte quelque chose. Il injecte une âme dans des silhouettes qu’on croyait déjà connaître par cœur.
adidas Samba Liberty London @nakedcph
@schuh
Une collab culte… mais trop subtile pour les algorithmes ?
Et pourtant, malgré cette richesse esthétique et historique, la collaboration adidas x Liberty London passe sous les radars. Pas un raz-de-marée sur les réseaux. Pas un “got ‘em” en story. Juste quelques aficionados éclairés et des mères stylées qui remercient l’univers d’avoir enfin trouvé une Stan Smith pour mini-moi sans licorne fluo. Alors quoi ? Pourquoi ça n’a pas pris comme ça aurait dû ? Première hypothèse : trop de subtilité dans un monde d’algorithmes. Aujourd’hui, ce qui buzze, c’est le logo XXL, le colorblock qui claque et le “one post wonder” sur Insta. Or, Liberty joue une partition plus fine : ses motifs sont puissants, mais délicats. Ça demande qu’on s’attarde, qu’on regarde, qu’on s’y attache. En gros, c’est une collab à vivre, pas juste à poster.
Deuxième hypothèse : l’ombre portée de Nike. Car oui, Liberty London avait déjà frappé très fort avec une collection Nike en 2013, dont une Air Max 1 Paisley qui a marqué les esprits. À l’époque, c’était osé, avant-gardiste, presque punk dans le monde très masculinisé du run rétro. Résultat : gros buzz, grosses ventes, gros souvenir.
Le problème, c’est que cette réussite est devenue une référence trop écrasante. Dès qu’on dit « Liberty x sneakers », l’imaginaire collectif pense Swoosh, pas Three Stripes. Dommage, car la proposition artistique avec adidas est sans doute encore plus mature, mieux intégrée, plus “couture street”, un genre trop rare, souvent raté, ici pleinement maîtrisé.
adidas Sambae Liberty London @lillyloud
adidas SL72 Liberty London @hhvclothing
Une ode au soft power de la sneaker
Au fond, ce qui rend cette collaboration culte, c’est aussi ce qu’elle dit sur l’évolution de notre rapport à la sneaker. Fini l’ère des grosses paires “statement” qui hurlent leur identité. Place aux modèles plus discrets, plus narratifs, qui cultivent l’allure autant que la performance.
La sneaker d’aujourd’hui veut séduire sans écraser, raconter sans crier. Et cette collab en est la preuve incarnée : elle ne cherche pas à faire le buzz, elle cherche à traverser le temps. Un peu comme ces vinyles oubliés qu’on redécouvre dix ans plus tard, et qui finissent par valoir plus qu’un pressage original des Stones.
On pourrait même y voir une réponse à la saturation du marché. Quand tout le monde veut sa collab bruyante, Liberty x adidas propose le luxe tranquille, l’héritage vivant, le design comme langage.
Les fleurs du bitume, version british
La collab adidas x Liberty London, c’est un manifeste silencieux dans un monde de sneakers assourdissant. Une collection à la fois poétique, précise, et puissamment actuelle. Une façon de dire que la rue n’a pas besoin de hurler pour se faire entendre. Parfois, un motif floral bien placé suffit à affirmer sa singularité.
Elle ne plaira peut-être pas à ceux qui veulent du buzz à 300 likes/minute. Mais elle séduira les amoureux des belles histoires, du détail qui compte, du style qui se vit plutôt qu’il ne s’affiche. En cela, oui, elle est culte. Et oui, elle est sous-estimée. Pour l’instant.
Et si on la regardait de plus près, au lieu de courir vers la prochaine collab tapageuse ? On y découvrirait peut-être un futur classique, tout en fleurs et en finesse. Et vous, vous en pensez quoi ? Trop doux pour le game actuel ou justement en avance sur son temps ? Dites-moi en commentaire quelle paire vous ferait craquer !
adidas Stan Smith Liberty London @ateliermonceau
@v_mikitty_v
Photo de la couverture : @grailpoint
Source : Liberty
L’intégralité de la collection adidas Originals x Liberty est disponible sur le site officiel de la marque aux 3 bandes : voir les paires.