Collectionner des baskets, c’est magique. Jusqu’au moment où votre banquier appelle. Ou que votre femme découvre la livraison cachée derrière le canapé. La passion des sneakers, c’est aussi des moments gênants. Très gênants même. Voici cinq situations où vous regrettez sincèrement d’être tombé dans la marmite sneakers.
1. Le jour où SNKRS a vidé le compte (et c’était pas prévu)
9 heures du matin. Vous êtes là, dans le noir, téléphone en main. Le drop de la la dernière Air Jordan 1 Travis Scott arrive. « Juste une tentative », vous murmurez. Comme si ça comptait. Miracle. La paire passe. Vous sautez du lit. Votre chat vous regarde comme si vous étiez fou. Le lendemain matin, un mail. Votre banque. « Attention, découvert de 300 euros. » Ah. Oui. Les deux autres raffles gagnés cette semaine. Vous aviez oublié. Trois paires à 180 euros pièce, ça fait un sacré trou. Votre mère vous a élevé mieux que ça. Mais Nike a inventé le système parfait avec Snkrs . Deux clics, et votre argent s’évapore. Trop simple. Trop dangereux.
Ces Air Jordan 1 High ? Elles sont dans le placard. Jamais portées. Vous les sortez parfois pour les admirer. 5 minutes. Puis retour dans la boîte. La logique a quitté le navire depuis longtemps. Entre nous, c’est plus de l’achat compulsif que de la passion. Mais bon. On se ment tous un peu.
2. Quand la météo massacre votre paire préférée (RIP les Parra)
Soleil éclatant le matin. Vous décidez de sortir le graal. Les Air Max 1 Parra. Celles qui vous ont coûté 2000 euros sur StockX. Vous avez hésité trois semaines avant de cliquer. Mais…. Impossible de résister. Dix minutes plus tard, le ciel se couvre. Vraiment ? L’averse tombe. Vous courez comme un dératé. Direction le métro. Trop tard. La toile blanche boit l’eau. Les couleurs commencent à baver. Votre âme quitte votre corps. De retour chez vous, crise d’angoisse. Le kit Jason Markk sort en mode urgence. Vous frottez pendant une heure. Délicatement. Comme si vous opériez un patient. Quelques taches persistent. Mince. La valeur de revente vient de chuter de moitié. Tous les collectionneurs connaissent cette paranoïa. Checker l’application météo devient un réflexe. Certains ont des paires sacrifiées pour les jours pourris. Des « beaters » dans le jargon. Porter des collectors sous la pluie ? Jamais. C’est comme mettre un tableau de maître aux toilettes. Vous avez appris la leçon. Les Parra restent au placard maintenant. Avec les autres paires trop précieuses pour affronter le monde réel.
3. « C’est des anciennes, chérie » (spoiler : c’est faux)
Samedi matin. Vous dormez paisiblement. La sonnette retentit. Le livreur.
Votre femme ouvre. Elle tient une boîte orange. Le logo Nike brille comme un panneau d’avertissement. Son regard est noir. « Encore ? » dit-elle. Juste ça. « Encore ? » Vous improvisez. « Ah bah non, c’est… c’est un retour. Je les renvoie. » Elle compte dans sa tête. Vous avez déjà douze paires blanches. Treize maintenant. Elle sait compter. « Elles étaient en soldes. Moins 70%. Une affaire. » Mensonge. Plein tarif. 180 euros. Vous êtes pathétique. Certains collectionneurs développent des stratégies dignes de la CIA. Livraison au bureau. Boîtes planquées chez un pote. Mélanger avec les anciennes paires. Jordan Geller possède 2 500 paires. Sa femme a dit oui. Vous, vous en êtes à 87. Et c’est déjà le drame conjugal. Le placard déborde. Les étagères plient. Votre passion dévore l’appartement. Centimètre par centimètre. Votre compagne parle de « choisir entre elle et les baskets ». Vous rigolez. Elle ne rigole pas. Ah. Les priorités deviennent floues parfois. Très floues.
4. Vendre une paire et le regretter jusqu’à votre mort
Mois difficile. Le frigo est vide. Votre loyer attend. Vous fixez votre collection. Les Yeezy 750 sont là depuis deux ans. Jamais portées. « Je m’en fous de cette paire », vous pensez. Mise en vente sur Vinted. Un acheteur. 200 euros. Ouf. Sauvé. Six mois passent. Vous les croisez dans la rue. Aux pieds d’un mec. Votre cœur se serre. Vous checkez StockX sur votre téléphone. Prix actuel : 600 euros. Le monde s’effondre. Pourquoi ? Pourquoi vous avez vendu si vite ? La patience aurait payé. Maintenant les racheter coûte trois fois plus cher. Impossible.
Ce regret vous ronge. Vous repensez aux autres erreurs. Les Nike Dunk Low Travis Scott vendues 300€. Elles valent 800 maintenant. Les Air Jordan 4 Union. Parties trop tôt. Bien trop tôt. Le marché de la revente joue avec vos nerfs. Les prix montent. Descendent. Remontent. Personne ne comprend vraiment. Mais vendre sous la pression reste l’erreur fatale. Toujours.
Vous avez créé un dossier photo. « Paires regrettées ». Vous le regardez parfois. Tard le soir. Comme on regarde des photos de son ex. Malsain mais impossible d’arrêter.
5. Camper douze heures pour finir avec des pieds gelés et rien
22 heures. Novembre. Il fait quatre degrés. Vous installez votre chaise pliante. Devant la boutique. Le drop des Air Jordan 1 High Off-White commence à 10 heures demain. 12 heures à attendre. Vous parlez sneakers avec les autres. Un gars collectionne depuis 1995. Un autre a 200 paires. Vous vous sentez chez vous. Presque. 4 heures du matin. Vous réalisez qu’il reste deux personnes avant vous. L’espoir revient. Vous allez peut-être la cop. Enfin. Votre tour. Le vendeur vous regarde. « Désolé. Plus votre taille. » Votre nuit vient de partir en fumée. Retour en RER. Gelé. Épuisé.
Les vrais passionnés rentrent les mains vides. Ce système frustre. Vraiment. Beaucoup abandonnent les campements maintenant. Les drops en ligne ? C’est SNKRS et ses bots. Un autre cercle de l’enfer. Vous jurez de ne plus jamais camper. Vous le referez le mois prochain. Bien sûr.
Pourquoi on continue quand même (on est fous, c’est tout)
Ces galères font partie du package. L’argent file. Votre femme soupire. Vos parents pensent que vous avez un problème. Ils ont raison. Un peu. Mais vous revenez. Toujours. La communauté compte aussi. Ces discussions nocturnes pendant les campements. Ces messages enflammés sur Instagram. Ce sentiment d’appartenir à quelque chose. La culture sneakers crée des liens. Des vraies amitiés naissent autour d’une simple paire. Et puis le frisson d’un drop réussi efface tout. Ce moment où la notification tombe. « Félicitations, votre commande est confirmée. » Vous pourriez pleurer. De joie. Comme un gamin à Noël.
C’est pathétique. C’est magnifique. C’est être sneakerhead.
Photo de la couverture : @siemon76





